Je me suis récemment livré à une petite expérience. J’ai pris la liste des cadeaux que j’ai l’intention d’offrir pour Noël et, plutôt que d’en saisir les intitulés sur les moteurs de recherche de sites de vente en ligne, j’ai gribouillé en face de chaque cadeau le nom d’un commerçant local où je pourrais le trouver. Très rapidement, je me suis rendu compte qu’ils sont tous disponibles dans un rayon de moins 5 km autour de chez moi (j’habite Verdun). Alors, certes, cela me prendra un peu plus de temps – encore que, si l’on prend en considération le temps passé à attendre dans les bureaux de poste et autres relais colis, je n’en suis pas bien sûr – et me coûtera probablement un peu plus cher (une centaine d’euros de plus pour une dizaine de cadeaux), mais l’argent que j’aurai ainsi investi restera dans l’économie locale, pourvoyeuse d’emplois autour de chez moi (dont profitent amis et proches). Se voiler la face est bien joli, mais il faut faire preuve d’une mauvaise foi évidente pour nier la situation difficile, voire critique, que traversent les commerçants locaux depuis plusieurs années. En France, le taux de vacance des commerces de centre-ville est passé de 7,2% à 9,5% entre 2012 et 2015, et la situation s’aggrave, tandis que la rentabilité des commerces de détail est passée de 5% à 2,6% entre 2011 et 2016.
Pour accompagner les commerçants meusiens et travailler avec eux aux tentatives de développement de leurs activités, ma position d’interlocuteur privilégié me permet de faire chaque jour le constat de leur découragement. Découragement face à une concurrence contre laquelle ils se sentent impuissants. Il est clair qu’en termes de prix, il est aujourd’hui impossible de concurrencer Amazon, Cdiscount ou Alibaba lorsque l’on a des charges et des salariés à payer. Certains ont fait le choix de se démarquer par la qualité de leurs produits, avec parfois beaucoup de succès. Mais trop soucieux d’accumuler, un peu comme s’il cherchait à faire des réserves d’objets hétéroclites dont il n’aura parfois jamais l’utilité, le consommateur moyen se laisse le plus souvent séduire par des promotions artificielles, rendues possibles par une gestion critiquable d’employés se démenant à longueur de temps dans des entrepôts géants. Plus que jamais, consommer est devenu un acte citoyen qui participe à la construction d’un modèle de société. Davantage que le bulletin que vous glissez dans l’urne au moment des élections, votre façon de consommer a un impact direct sur l’activité économique. Les bons sentiments et les bonnes intentions ne suffiront pas à sauver les entreprises locales et les emplois qu’elles génèrent sans une prise de conscience massive se traduisant dans les actes. Je ne peux que vous encourager à suivre mon initiative en vous demandant s’il n’y a vraiment pas moyen de trouver vos cadeaux autour de chez vous. Economiser une poignée d’euros est-il vraiment plus important que préserver l’économie et les emplois locaux ?